The French Junior Minister for the Family, Dominique Bertinotti, gives an interview to 'Le Monde' saying she's been getting treatment for cancer since last March. Not even the prime minister knew, although she had informed François Hollande.
She said nothing. Neither to the first minister, Jean-Marc Ayrault, nor to her boss, Marisol Touraine, nor to any other member of the Government. After her first chemotherapy session, 2nd March, she just asked Francois Hollande for a meeting at the Elysée Palace, for 'personal reasons'. She simply said 'I have cancer, I have begun treatment. I would like this to remain strictly between us'. The President advised her to make her own personal choice, that she must do what was best for her and if she chose to remain silent about her cancer, he would respect that.
At that moment, the political agenda became intense as the law for 'mariage pour tous' was about to be brought before the Sénat - the law that would bring about much public opposition and political and public unrest.
As the article states, a politician who is ill is just like any other sick person. However, they cite the example of the Danish TV series where a female politician is depicted as having breast cancer as being a rare illustration of a politician with cancer. They also cite Francois Mitterand, who when suffering from prostrate cancer in 1992, firstly forced his doctor to lie to the public about his illness but who was eventually obliged to tell the truth about his illness. Le Monde says there is no place for fragility in the world of politics.
Bertinotti describes the difficulty of finding a convenient time for a mammogram which she eventually undertook on 22 February when the radiologist announced the bad news that the images were suspect and that a biopsy of the area was needed urgently. The results confirmed the suspicions from the mammogram and the proposed treatement at the Marie Curie Institut was chemotherapie, surgery and radiotherapy. A chimotherapy catheter was put in and the treatment started in March.
Bertinotti says 'I had nothing, no sign. And then, in a moment without warning, you become a sick person. You enter into another world. It drops like a stone onto your head and it never stops - the exams, the MRI, the cold sweats, the results which frighten you. You bear it all on your shoulders'.
She remembers been given a sick note by the nurse and asking her 'who do I give this to?' and remembers asking the question 'can I continue to work?' The answer was that she had a 50/50 chance of being capable of continuing the work that she was so passionate about. Keeping the news secret was partly in her nature but also she felt she couldn't face the disease whilst being in the public eye.
She recalls buying her wig after the second session of chemotherapy when her hair began falling out when she decided to shave her head and recalls feeling hundreds of pairs of eyes on her in her role as minister and being in front of the public and the tv cameras, being scared that her wig would fall off.
After her eighth chimotherapy session at the end of August, just before her operation, she had to take part in a debate at La Rochelle and it was here she felt she had reached her physical limits. She missed just one cabinet meeting, the day after her operation.
She did recall that her position as a minister did afford her several privileges during her treatment - a chauffeur instead of a taxi, not having to wait too long at the Curie Institut for example.
Bertinotti also recounts that at this time she took much more care of herself. She woke up earlier, to get made up, the more she felt ill, the more she took care of herself.
As Bertinotti says herself, the choice to stay silent was her personal choice. It has to be said that sometimes a long absence from work is neither necessary nor the best option for everyone. 'As a minister, my only question was if I was capable of achieving my goal and it's done.'
Here's the article as it appeared in 'Le Monde' on 22 November 2013:
Dominique Bertinotti va bientôt enlever la perruque qu'elle porte depuis plus de huit mois. On verra d'un coup ses cheveux très courts. Elle vient d'effectuer cette semaine une dernière séance de radiothérapie avant "la quille", comme elle dit avec une volupté soudaine. Elle avait choisi le silence, elle fait tomber le masque.
En cent soixante-dix heures de débats sur le mariage pour tous entre l'Assemblée et le Sénat, où elle était en première ligne derrière la garde des sceaux, Christiane Taubira, personne ne s'est rendu compte de rien. Son amie Ségolène Royal lui avait bien trouvé mauvaise mine à l'université d'été du Parti socialiste à La Rochelle. La ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine, s'était étonnée de "certains signes sur son visage". Sans plus. Il y a une quinzaine de jours, la ministre a demandé à voir Jean-Marc Ayrault. Ils se sont mis dans un coin de l'Assemblée nationale, il est tombé des nues. "Est-ce que tu as pu te reposer ?", lui a-t-il demandé.
UN POLITIQUE MALADE EST UN MALADE COMME LES AUTRES
Les hommes et les femmes politiques ne parlent jamais de leur cancer. A croire que cette maladie omniprésente dans nos vies modernes épargne étrangement les représentants de l'Etat français. Il faut aller au Danemark, dans la série télévisée "Borgen", pour trouver une femme politique, ancienne première ministre, en prise avec le cancer du sein. Ou remonter à François Mitterrand, obligé d'avouer un cancer de la prostate avancé en 1992, après avoir fait mentir son médecin personnel sur son état de santé pendant dix ans. La politique ne laisserait-elle place à aucun aveu de fragilité, en particulier en France, où l'on persiste à vouloir l'Etat protecteur et prométhéen ? Un politique malade est un malade comme les autres. A ceci près qu'il est sous constamment sous les regards. Et qu'il doit faire face un peu plus que d'autres à cet effet secondaire effrayant : un crâne chauve, sans sourcils, sans cils.
Au commencement, la mammographie de routine. Pas facile de choisir une date en plein projet de loi sur le mariage pour tous, qui a été présenté en conseil des ministres fin 2012. Au Parlement, on sait qu'on part pour des nuits marathon et qu'on ne maîtrise plus ses horaires. Le meilleur moment est pile entre la première lecture à l'Assemblée et celle du Sénat. Le 22 février tombe bien. Un vendredi. Qui n'a pas guetté avec hantise les signes de tête d'un radiologue ? La phrase tombe. "Les images sont très suspectes, il faut analyser les tissus, vite."
"ÇA VOUS TOMBE DESSUS ET ÇA NE S'ARRÊTE PLUS"
La ministre part avec son compte-rendu, un charabia savant, mais un mot apparaît : "malignité". Le reste va vite. Examen, ponctions, verdict. Rendez-vous à l'Institut Curie le 28 février. Le protocole : chimiothérapie, puis chirurgie, puis radiothérapie. Pose du cathéter le 1er mars. Première chimio le 2. "Je n'avais rien, aucun signe. Et puis à un moment, sans transition, vous devenez un malade. Vous entrez bien portante, vous ressortez dans un autre monde. Ça vous tombe dessus et ça ne s'arrête plus, les examens, l'IRM, les sueurs froides, les résultats qui font peur. Vous prenez tout sur la tête."
La ministre a gardé en souvenir l'arrêt de travail d'une semaine que lui a donné l'infirmière. "A qui je vais donner ça ?", a-t-elle demandé. "A qui vous voulez", a répondu l'infirmière. La première question que la malade avait posée au médecin, c'était : "Est-ce que je vais pouvoir continuer à travailler ?" Réponse : "Une chance sur deux." Dans un deuxième temps, elle avait hasardé : "Est-ce que ça se guérit ?" Elle n'a obtenu ni un oui ni un non. Un discours avec des statistiques, des chiffres. Et elle n'a pas posé la question qui lui importait finalement le plus : "Est-ce que, en tant que personne publique, je vais pouvoir tenir le silence ? Est-ce que ça ne va pas se voir ? »
En rentrant, elle garde le secret. C'est sa nature. Le président Mitterrand, qui l'a nommée jadis mandataire des archives élyséennes, appréciait la pudeur extrême de cette agrégée d'histoire. Ceux à qui elle se confie se comptent sur les doigts d'une main : famille restreinte, une amie, trois personnes bien précises de son cabinet, et le président de la République. "Serais-je restée silencieuse si je n'avais pas été une femme politique ? Je ne sais pas. Personne ne peut dire comment on va entrer dans la maladie. Instinctivement, je ne voulais pas mettre le cancer au centre. Je voulais bien être une ministre malade, pas une malade ministre. C'est un tel ébranlement de vous-même… Je ne me sentais pas assez forte pour gérer en plus le regard des autres."
L'Assemblée nationale. Une centaine de paires d'yeux qui vous dévisagent. Des caméras qui vous scrutent. Dominique Bertinotti a acheté sa perruque un lundi, quelques jours après la deuxième séance de chimio. Les cheveux commençaient à tomber par touffes, elle a pris les devants, s'est fait raser la tête. Le lendemain, c'est mardi, les fameuses questions d'actualité générale. "Summum du summum, une question m'est adressée. Sur la réforme des prestations familiales ou le mariage, je ne sais plus. Là je me suis dit : “C'est la totale.” Vous vous levez, vous êtes filmée, il y a un public qui ne regarde que vous. On vous a répété que la perruque était très bien faite mais vous êtes sûre qu'elle va tomber. Là, je me souviens, je me suis dit : “Reste neutre, il ne faut surtout pas que tu bouges.”" Pas de réactions dans l'hémicycle. Elle se rassoit, presque heureuse. "J'ai pensé : c'est bon, ça peut passer."
"MINISTRE, PAS MINISTRE, ÇA VOUS ATTEINT DANS VOTRE CHAIR"
Elle n'a pas le souvenir d'avoir pleuré. Elle a vite coupé court à la diabolique tentation d'Internet et aux inventaires de cas anxiogènes. Elle a organisé son agenda en fonction des huit matinées de chimio avec l'équipement glacé – casque, moufles et chaussettes à – 20 degrés – prétendument pour aider la repousse des cheveux et des ongles, qui tombent aussi. Elle a veillé à ne pas être démasquée par les maquilleuses, avant un plateau-télé. Elle est allée puiser au bout de ses forces pour ne pas craquer, "ces lendemains de chimio où monter trois marches, c'est l'Everest". Elle a affronté sa sinistre tête chauve tous les matins devant la glace. Le cap des sourcils qui disparaissent, ce qui vous défigure. Cette sensation métallique dans la bouche. La perte du goût. "C'est une maladie qu'on ne peut pas oublier. Ministre, pas ministre, ça vous atteint dans votre chair."
Il y a les petits réconforts. L'infirmière de Curie qui vient la voir en catimini : "Il faut tenir sur le mariage pour tous, c'est bien, ne lâchez pas !" François Hollande qui n'évoque même pas l'idée qu'elle s'arrête de travailler. La "rare humanité" d'un médecin. Le coiffeur qui lui dit, après la tonte, qu'elle a "un beau crâne". "Vous n'imaginez pas le bien que ça fait. On se raccroche à ça."
La vie politique continue. La préparation de la loi sur la famille, les débats fous du mariage pour tous, les séances de nuit, la violence, les horreurs qui fusent. Cette nuit d'avril où les députés ont failli en venir aux mains, la ministre avait exceptionnellement demandé à son confrère chargé des relations avec le Parlement, Alain Vidalies, de rentrer chez elle plus tôt. Après sa huitième séance de chimio, fin août, juste avant son opération, elle discourait sur l'estrade de l'amphithéâtre à La Rochelle. "J'avais atteint mes limites physiques. Les yeux qui pleuraient. Je faisais de l'oedème." Elle manque une fois le conseil des ministres, le lendemain de son opération. "Elle a eu un problème de santé dans la nuit et ne peut être présente", fait-elle écrire au secrétaire général du gouvernement.
La politique l'a aussi aidée à tenir debout. Pas seulement pour les quelques privilèges – le droit de ne pas trop attendre à Curie, avoir un chauffeur plutôt qu'un taxi. Surtout pour "le supplément de défi" qu'il y a à être une personne publique. "J'étais obligée de m'occuper de moi deux fois plus. J'ai remonté mon heure de réveil pour me pomponner. Plus ça se détériore, plus vous vous maquillez. J'ai eu droit à : “Tu as vraiment bonne mine !” “Ta coiffure est très réussie !” C'est bon à prendre…"
Dominique Bertinotti, 59 ans, a hésité à nous raconter son cancer. Elle ne veut pas susciter la compassion, dit-elle. Elle ne veut pas en faire un instrument politique. Elle ne veut pas, surtout, "être réduite à un cancer". Pourquoi parle-t-elle maintenant, elle qui s'est astreinte à huit mois de secret quasi absolu ? "Pour aider à faire évoluer le regard de la société sur cette maladie dont le nom est terriblement anxiogène. Pour montrer qu'on peut avoir un cancer et continuer une vie au travail. Pour que les employeurs comprennent que la mise en congé longue maladie n'est pas forcément la meilleure des solutions. Pour qu'il y ait moins de peur, plus de compréhension. Pour qu'on réfléchisse sur les inégalités face au coût des traitements de confort, comme le vernis spécial pour les ongles ou la perruque, qui sont si importants." "Dominique nous a bluffés, dit Marisol Touraine. Pouvoir vivre avec sa maladie sera l'un des grands enjeux à venir."
Le dire, ne pas le dire ? "Même si nous l'avions su, le respect que l'on doit à une personne engagée et malade est de tenir le débat de façon ordinaire", note l'UMP Hervé Mariton, opposant vigoureux au mariage pour tous. Dominique Bertinotti n'a pas d'avis. "Ce choix du silence est de l'ordre de l'intime. Chacun a sa façon d'entrer en maladie. Comme ministre, ma seule question était de savoir si j'avais la capacité de remplir ma mission. C'est fait."
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